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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

les hommes, » et devant ses rayons indéfectibles il n’y a pas de Cimmérien[1]. Hâtons-nous de conquérir le salut par la régénération ! Prenant pour modèle l’unité de l’essence divine, hâtons-nous de nous confondre, nombreux fidèles, dans l’unité d’un seul et même amour, et, désireux de contempler l’essence souverainement bonne à la bonté de laquelle nous participons, marchons également dans l’unité. En effet, le concours de voix nombreuses formant, après la dissonance et la variété, une harmonie divine, monte au ciel comme un concert unique à la suite du Verbe, maître et chef du chœur, et se repose dans la même vérité, en disant : « Mon Père ! mon Père ! » Tel est le premier cri légitime qui, poussé par les enfants de Dieu, est accueilli là haut par la faveur de Dieu.

Mais je vous entends. Il vous en coûte de renverser les coutumes qui vous ont été transmises par vos ancêtres ; c’est un sacrifice qui répugne à la raison. Eh bien ! à ce prix, pourquoi votre jeunesse ne s’alimente-t-elle plus du lait qu’une nourrice offrit aux lèvres de votre enfance ? Pourquoi augmenter ou diminuer l’héritage de vos pères, au lieu de le garder scrupuleusement tel qu’ils ont pu vous le léguer ? Pourquoi ne vous vois-je plus jouer sur le sein paternel, ou vous livrer à ces jeux puérils qui appelaient sur vous le rire des spectateurs quand vous étiez dans les bras de vos mères ? Pourquoi enfin dépouiller de vous-mêmes et sans le secours d’aucun maître les langes ainsi que les habitudes du premier âge ? Si les transports des passions, toujours dangereux, souvent mortels, nous font éprouver quelque plaisir cependant, pourquoi, quand il s’agit de la vie, ne renoncez-vous pas à

  1. Les Cimmériens étaient d’anciens peuples de la Campanie qui vivaient de pillage et demeuraient dans des antres inaccessibles à la lumière. On imagina de là que leur pays était plongé dans l’obscurité et continuellement privé de la clarté du jour. Aussi Plutarque assure-t-il que cette contrée fournit à Homère ses plus belles descriptions de l’enfer et du royaume de Pluton. Virgile et Ovide y placèrent le Styx, le Phlégéthon et les demeures des ombres.