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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

de l’homme, vous ne reculez point, vous ne fuyez pas ! Quel bien peuvent vous faire des êtres malfaisants ? Mais je puis vous montrer des hommes meilleurs que vos dieux, c’est-à-dire vos démons. Est-ce que Solon, Cyrus, ne valent pas mieux que le divin Apollon ? Votre Phœbus aimait les offrandes et non les hommes ; il trahit Crésus son ami, il en oublia les présents, et jugez s’il tenait beaucoup à la gloire ; il mena lui-même Crésus au bûcher par le fleuve Alys. C’est ainsi que les démons conduisent au feu leurs amis, leurs adorateurs. Ô hommes plus vrais, plus amis des hommes que le divin Apollon, ayez compassion de cet infortuné prince attaché sur le bûcher. Solon, dites hardiment la vérité. Pour vous, Cyrus, faites éteindre le feu ; mais vous, Crésus, devenez sage à l’école du malheur. Quel être ingrat vous adorez ? il prend votre or et s’en va. Oui, Solon, en toutes choses, voyons la fin ; prince, ce n’est pas un démon, mais un homme qui vous donne ce conseil. Les oracles de Solon ne sont pas obscurs ; il vous sera facile maintenant de le comprendre ; instruit sur un bûcher par les leçons de l’expérience, vous aurez reconnu que lui seul vous portait la vérité.

Je me demande avec étonnement dans quelle intention les auteurs de ces extravagances ont répandu ces funestes superstitions et autorisé par des lois le culte de ces mauvais génies. Que ce soit Phoronée ou Mérops ou tout autre qui leur ait élevé des temples, des autels, et offert les premiers des sacrifices, il est certain que depuis leur époque les hommes se sont fait des dieux pour les adorer. On place l’amour parmi les plus anciens ; toutefois personne n’avait songé à lui rendre des honneurs divins avant Charmus, qui dressa un autel dans l’académie, au jeune adolescent qu’il aimait et qu’il souilla après s’en être rendu possesseur. C’est ainsi que la plus honteuse passion fut appelée amour et placée au rang des dieux. Les Athéniens ignoraient ce qu’était Pan avant de l’avoir appris de Philippide. Est-il étonnant que la superstition une fois établie soit devenue un foyer de corruption, que négligée dans le principe, elle ait pris tous les jours de nouveaux ac-