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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

contre les Mèdes, la Pythie ordonna aux Platéens de sacrifier à Androcrate, à Démocrate, à Cyclée, à Leucon. Si vous voulez y faire attention, vous trouverez bien d’autres démons semblables. « La terre, dit Hésiode, compte jusqu’à trois fois six mille esprits immortels qui veillent à la garde de l’homme. » Ces gardiens que sont-ils ? Veuillez nous l’apprendre, grand poëte de la Béotie ! Il est clair que ce sont les démons dont je viens de vous parler. Apollon, Diane, Latone, Cérés, Proserpine, Pluton, Hercule, Jupiter, qui reçoivent de plus grands honneurs, sont des démons d’un ordre plus relevé. Ô vieillard d’Ascra ! ils nous gardent, et pourquoi ? Est-ce de peur que nous ne nous sauvions, ou plutôt, exempts de crimes, ne veulent-ils pas nous conserver purs ? Alors on pourrait dire comme le proverbe : le père incorrigible veut corriger son fils.

Ah ! s’ils nous protégent, assurément ce n’est point parce qu’ils nous aiment ; ce sont de vrais flatteurs qui veulent notre perte et s’attachent à nous, attirés par l’odeur des sacrifices. Sachez leur gourmandise, ils ne s’en cachent point : la vapeur des libations et des victimes, s’écrient-ils, est un tribut d’honneur qui nous appartient. Et si les dieux de l’Égypte (je veux dire les chats et les belettes) pouvaient parler, ne tiendraient-ils pas le langage d’Homère, ce langage si poétique, tout parfumé de l’odeur des viandes et plein d’amour pour l’art qui les apprête ? Voilà vos génies, vos dieux, ceux que vous nommez demi-dieux, comme on appelle mulets les demi-ânes ; car vous ne manquez pas de termes pour exprimer ces alliances impies. Ajoutons que vos dieux sont des génies cruels, ennemis des hommes : non contents de les aveugler et de les corrompre, ils se font du carnage et du meurtre une sorte de volupté. Les combats sanglants du Cirque, les innombrables batailles où des nations s’entretuent pour le fantôme de la gloire, font les délices de ces dieux, qui se repaissent à loisir de sang et de carnage. Lorsqu’ils tombent sur des peuples ou sur des villes comme des fléaux dévastateurs, ils en exigent des libations de sang humain. Le Messénien Aristomène immole à Jupiter Ithomète trois cents hommes, et se croit fort agréable au ciel par