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DE LA TRADITION.

la succession des temps, il faudra soutenir aussi qu’elle est devenue caduque à l’égard des autres faits sur lesquels le Christianisme est fondé, et en particulier à l’égard de la question de savoir quels sont les livres qui nous ont été donnés par les apôtres comme Écriture Sainte.

Sixième preuve. — Des réflexions que nous venons de faire, il s’en suit déjà que l’Écriture seule n’aurait pas été un moyen suffisant pour répandre et pour conserver la doctrine de Jésus-Christ, s’il n’y avait pas un ministère, une mission, un enseignement public, pour attester aux fidèles l’authenticité, l’intégrité, la divinité des livres saints ; pour les leur expliquer et leur en donner le véritable sens. Mais cette vérité est encore confirmée par d’autres raisons.

1° Dans les premiers siècles, peu de personnes avaient l’usage des lettres, et l’ignorance devint encore plus générale après l’inondation des peuples barbares. Avant l’invention de l’imprimerie, une Bible était un livre très-cher, et les exemplaires n’en étaient pas communs. Il est évident que pendant quatorze cents ans les trois quarts et demi des Chrétiens étaient réduits aux seules instructions du pasteur. Nous ne croyons pas pour cela que le saint leur ait été beaucoup plus difficile qu’à nous. Dieu ne l’a jamais attaché à des moyens rares, dispendieux, presque impraticables, Moïse le fit remarquer aux Juifs ; il n’y a pas lieu de penser que Dieu en agit avec moins de bonté envers les Chrétiens. Nous avons fait voir ailleurs que dans l’Église catholique la foi des simples et des ignorants, fondée sur la mission des pasteurs qui les instruisent et sur la tradition, est très-sage et très-solide. Nous examinerons ci-après si celle du commun des Protestants est plus certaine et mieux appuyée.