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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

nom. L’admirable personnage, que ce Jupiter savant dans l’avenir, hospitalier, favorable aux suppliants, plein de clémence, adoré des mortels, vengeur des crimes ! Disons plutôt injuste, sans frein, sans pitié, sans loi, violent, atroce, impudique, corrupteur, adultère. Et pouvait-il être autre chose, puisqu’il était homme ?

Il me semble que toutes vos fables ont bien vieilli : Jupiter n’est plus ni dragon, ni cygne, ni aigle. Ce n’est plus un homme livré à l’amour, ni un dieu qui vole sous la forme d’un oiseau. Il ne cherche plus de jeunes enfants, il n’est plus prodigue de tendresse, il n’use plus de violence, bien qu’il existe grand nombre de femmes plus gracieuses que Léda, plus belles que Sémélé ; une multitude de jeunes adolescents mieux faits et mieux élevés que le pâtre de Phrygie. Où est maintenant l’aigle, où est le cygne, où est Jupiter lui-même ? Il a vieilli avec ses ailes d’emprunt. Ce n’est pas qu’il se repente de ses amours, ni qu’il ait appris la tempérance ; mais toute l’imposture vous est aujourd’hui dévoilée. Léda est morte, l’aigle est mort, le cygne est mort. Cherchez votre Jupiter, mais pour cela ne montez pas au ciel : fouillez la terre. Callimaque de Crète vous dira, dans ses hymnes, où il est enterré. « Grand roi, s’écrie-t-il, les Crétois vous ont élevé un tombeau. » Car il est mort, souffrez que je vous le dise, il est mort comme Léda, comme le cygne, comme l’aigle, comme le serpent ; il est mort comme meurt l’homme, et l’homme voluptueux. Si je ne me trompe, les esprits nourris de tant d’absurdités sont amenés aujourd’hui en dépit de leurs passions, à reconnaître combien grandes étaient leurs erreurs sur les dieux, témoin ce vers d’Homère : « Vous n’êtes sorti ni d’un chêne antique, ni d’un rocher, mais de la race des hommes. » Cependant vous les verrez dans l’exacte vérité, chêne et pierre. Staphyle dit qu’on adore à Sparte un certain Agamemnon sous le nom de Jupiter. Phanocle, dans son livre intitulé Des Amours ou des Beautés, rapporte qu’Agamemnon, roi des Grecs, fit élever le temple de Jupiter Argyne en l’honneur d’un jeune homme de ce nom qu’il aimait éperduement. « Les Arcadiens, dit Callimaque dans son Livre des Causes, adorent une Diane qu’on sur-