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SAINT CLÉMENT D'ALEXANDRIE.

que ce Dieu, touché d’une misère si profonde, fit sortir de la pierre, c’est-à-dire du cœur des Gentils, un germe de piété, le sentiment de la vertu.

Les imposteurs, les hypocrites, habiles à se déguiser, toujours en embuscade pour surprendre la justice, il les appelle race de vipères. Mais que le repentir touche leur cœur, qu’ils suivent le Verbe, de serpents qu’ils étaient, ils seront des hommes divins. Il en appelle d’autres loups couverts de peaux de brebis, désignant par là les hommes rapaces et avides. Eh bien ! toutes ces natures si féroces, toutes ces pierres si dures se sont amollies, sont devenues les hommes les plus doux. Et voilà l’œuvre de notre chantre céleste et de ses divins accords.

Et nous aussi, pour me servir du langage de l’Écriture, nous étions autrefois insensés, incrédules, égarés, asservis à nos passions et à nos plaisirs, pleins de malice et d’envie, dignes de haine, et nous haïssant les uns les autres. Mais, depuis que la clémence du Dieu Sauveur a paru sur la terre, nous avons été sauvés, non pour nos œuvres de justice, mais par sa miséricorde. Admirez donc la puissance de ces nouveaux accords, ils transforment en homme la brute sauvage, la pierre insensible. Ceux qui étaient comme morts, qui n’avaient plus part à la vraie vie, n’eurent pas plutôt entendu ce chant céleste, qu’ils se sentirent renaître, et sortirent de leur tombeau.

N’est-ce pas le Verbe, ce chantre des cieux, qui a mis ce bel ordre, ce bel ensemble dans l’univers, qui a enseigné aux éléments en désaccord à former un concert admirable, de sorte que ce monde est tout harmonie. Il a déchaîné les flots de l’océan et leur a défendu d’envahir la terre. Celle-ci flottait au hasard comme un navire, il l’a fixée au milieu des eaux, jetées autour d’elle comme un rempart. Ainsi que le musicien qui sait adoucir les modes doriens par ceux de la Lydie, il a tempéré la violence du feu par le contact de l’air, et l’âpre rigueur du froid par l’étroite alliance du feu ; il a lié, il a tempéré les unes par les autres toutes les parties du monde, comme en musique, les derniers tons se fondent avec les premiers, par une gradation merveilleuse. Vous retrouvez dans l’univers le par-