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insensibles, alors ils les rongent, ils sautent dessus, ils s’y perchent, et si vous ne les chassiez ils feraient leurs nids dans la bouche même de ces dieux. Les araignées leur couvrent le visage de leurs toiles, elles en suspendent les fils à leur tête. Vous les nettoyez, vous les frottez, vous les grattez, tant vous soignez, tant vous protégez les dieux de votre façon ! Aucun de vous ne se dit qu’il faut connaître Dieu avant de l’adorer. Vous vous hâtez, en aveugles, d’obéir à vos pères ; vous aimez mieux embrasser l’erreur commune que d’écouter votre raison ; vous craignez sans connaître. Dans l’or et l’argent, on a consacré l’avarice ; de vaines statues sont devenues des êtres importants, grâce à leur forme.

Ainsi est née la superstition romaine. Et dans les rites dont se compose le culte, si vous les passez en revue, combien vous en trouverez qui font rire, combien qui font pitié ? Parmi vos prêtres, les uns courent nuds çà et là au fort de l’hiver, d’autres marchent gravement, la tête couverte d’un bonnet, portant aux bras de vieux boucliers, se déchirant la peau, promenant des dieux qui demandent l’aumône le long des rues. Ce temple ne peut s’ouvrir que deux fois par an. Dans cet autre on ne peut mettre le pied sans crime. Quelques-uns sont interdits aux hommes ; ceux-là cessent d’être sacrés par la présence d’une femme ; qu’un esclave se trouve à certaines cérémonies, c’est un sacrilége qui demande expiation.

Telle statue ne peut être couronnée que par une femme qui n’a connu qu’un mari ; telle autre par une femme plusieurs fois mariée. On cherche avec grande dévotion celle qui compte le plus d’adultères. Que dirai-je de celui qui fait des libations de son propre sang, et qui prie par les blessures dont il se couvre ? ne lui vaudrait-il pas mieux être profane que religieux à ce prix ! Ceux qui se mutilent n’offensent-ils pas les dieux qu’ils pensent apaiser ! Car si vos dieux voulaient des eunuques, ils pourraient en créer et vous dispenser d’en faire. Ne voit-on pas que ce sont des esprits malades, des hommes dépourvus de sens et de raison, qui donnent dans ces folies ; que ceux qu’elles égarent se prêtent un mutuel appui. En