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SAINT IRÉNÉE.

ner les choses qui ne sont pas à lui, en disant : Je te donnerai tout ce que tu vois devant toi, si tu consens à m’adorer. Le démon reconnaît donc, en tenant un pareil langage, que lorsqu’on consent à l’adorer lui-même et à se soumettre à sa volonté, on est dès lors déchu de l’héritage glorieux de Dieu. Et à quel bonheur pourra prétendre celui qui est ainsi déchu ? Que peut-il attendre, que peut-il espérer autre chose que la mort de son âme ? Car cette mort nous menace sans cesse dès que nous sommes séparés de Dieu. Le démon d’ailleurs ne nous donnera rien de tout ce qu’il nous a promis. Comment pourrait-il donner à celui qui est tombé dans le péché, ce qui n’est pas en sa disposition ? Et puis, s’il a quelque pouvoir sur l’homme, Dieu a tout pouvoir sur lui ; rien ne se fait sans la volonté du Père, et un passereau ne tombe pas à terre sans qu’il le veuille. Ainsi, lorsque le démon dit au Christ : toutes ces choses m’ont été données, et je les donne à qui je veux, il s’égare dans son orgueil. Les choses créées ne sauraient être en son pouvoir, puisque lui-même est une créature. Il ne peut donc pas disposer des royaumes de la terre qui sont, ainsi que tout ce qui est relatif à l’humanité, avec tout le reste de la création, gouvernés par la volonté de Dieu. Le Seigneur ne nous a-t-il pas dit lui-même : « Le démon a été menteur dès le commencement, et il n’a point persévéré dans la vérité ? » Si donc il est menteur, s’il ne se tient jamais dans la vérité, il ne disait donc autre chose qu’un mensonge, en disant : Toutes ces choses m’ont été données et je les donne à qui il me plaît.


CHAPITRE XXIII.


Le démon est le père du mensonge ; c’est par le mensonge qu’il a fait tomber dans le péché nos premiers parents, le sixième jour après la création ; la rédemption du péché par le Christ a eu lieu aussi un sixième jour.


Dès le commencement le démon était déjà accoutumé à mentir contre Dieu, lorsqu’il vint séduire l’homme dans le paradis