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victimes et les adorent, comme s’ils étaient des dieux, sans s’appercevoir qu’ils ne sont rien autre chose que ce qu’ils étaient sous leur main ; c’est-à-dire de la pierre, de l’airain, du bois, des couleurs ou toute autre matière semblable. Et n’est-ce pas ce que vous voyez vous-même, lorsque vous lisez les histoires et les généalogies de ces ridicules divinités ? Vous les regardez comme des hommes, pendant que vous avez sous les yeux le récit de leur naissance ; puis vous les honorez comme des dieux, sans considérer qu’ils sont réellement engendrés, ainsi que vous l’apprenez des histoires que vous lisez.

III. Puisqu’ils ont été engendrés, sans doute qu’ils engendraient aussi. Mais quels sont ceux que nous voyons naître aujourd’hui ? Car, si alors ils engendraient et s’ils étaient engendrés, il est clair que leur génération devrait se perpétuer encore ; autrement, il faudrait dire qu’ils sont dégénérés. Ou bien, en effet, ils ont vieilli et ne peuvent plus engendrer, ou ils sont morts, et n’existent plus. Car, s’ils naissaient autrefois, ils devraient naître encore aujourd’hui, comme nous naissons nous-mêmes ; bien plus, leur nombre devrait surpasser de beaucoup celui des hommes, selon ces paroles de la Sibylle : « Si les dieux engendrent et s’ils sont immortels, ils doivent être beaucoup plus nombreux que les hommes, et ne laisser à ces derniers aucun endroit qu’ils puissent habiter. » En effet, si les hommes, qui sont mortels, et dont la vie est si courte, n’ont cessé jusqu’à ce jour de naître et de se reproduire, ensorte qu’ils remplissent les villes, les bourgades et les champs, à combien plus forte raison les dieux, qui ne meurent point, selon le langage des poëtes, devraient-ils continuer d’engendrer et d’être engendrés, comme vous dites qu’ils l’ont fait autrefois ? Pourquoi le mont Olympe, jadis habité par les dieux, est-il aujourd’hui désert ? Pourquoi Jupiter, qui, au dire d’Homère et des autres poëtes, demeurait sur le mont Ida, l’a-t-il abandonné sans qu’on sache maintenant où il s’est retiré ? Pourquoi n’était-il point partout, mais seulement dans une partie de la terre ? C’est sans doute parce qu’il négligeait les autres contrées, ou qu’il ne pouvait être en tous lieux, ni étendre partout sa pro-