Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 2.djvu/42

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ture, et partant peut être détruit et anéanti. Dieu seul est incréé, incorruptible : c’est par là même qu’il est Dieu ; ce qui vient après lui est créé, et par là même périssable : c’est pour cela que des âmes peuvent être punies et mourir. Incréées, elles ne pécheraient point, elles ne donneraient dans aucun excès de folie, elles ne seraient ni lâches ni féroces, elles ne se décideraient point à entrer dans le corps des pourceaux, des serpents, des chiens, et il ne serait pas possible de les y contraindre par-là même qu’elles seraient incréées. Supposez deux êtres incréés, ils sont nécessairement semblables, égaux, ou plutôt ils ne font qu’un ; l’un ne surpasse point l’autre en pouvoir ou en dignité : d’où je conclus qu’il n’existe pas plusieurs êtres incréés ; car, s’il y avait entre eux la moindre différence, toutes les recherches possibles ne pourraient vous en faire découvrir la cause ; votre pensée se perdrait dans l’infini, vous reviendriez après bien des peines inutiles vous rattacher à un seul être incréé, et le reconnaître comme la cause de tous les autres êtres.

Croyez-vous, ajoutai-je, que Platon, Pythagore, qui sont pour nous comme les remparts de la philosophie, aient ignoré tout ce que nous venons de dire ?

VI. — Peu m’importe, reprit le vieillard, et Platon et Pythagore, et tous ceux qui partagent leurs idées. Voici la vérité qu’ils n’ont pas comprise et que vous comprendrez facilement. Ou l’âme est la vie même, ou seulement elle la reçoit. Si elle est la vie, elle doit la communiquer à un autre objet qu’à elle-même, comme le mouvement qui ne se renferme pas en lui, mais se communique au dehors. Que l’âme vive, personne ne le nie ; mais si elle vit, ce n’est pas parce qu’elle est la vie, c’est seulement parce qu’elle y participe. Or, il y a une grande différence entre participer à une chose et être la chose elle-même. L’âme participe à la vie uniquement parce que Dieu veut qu’elle vive, et si Dieu cessait de le vouloir, elle cesserait d’exister, car la vie n’appartient pas en propre à l’âme comme elle appartient à Dieu. Qui ne sait pas que l’homme n’existe pas toujours, que l’âme n’est pas toujours unie au corps, qu’elle