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yeux ont été faits pour un autre usage ? Car il n’en est pas de la loi que nous observons comme des lois humaines auxquelles le méchant peut quelquefois se soustraire : ainsi que je vous le démontrais naguère, grands princes, c’est notre Dieu qui nous l’a donnée, et cette divine loi règle tous nos devoirs envers nous-mêmes et envers le prochain.

Selon la différence de l’âge, nous regardons les uns comme nos enfants, les autres comme nos frères et nos sœurs, et nous honorons les vieillards comme nos pères et nos mères ; aussi avons-nous grand soin de conserver l’innocence de ceux que nous regardons comme nos parents, et à qui nous donnons ces doux noms de famille ; l’Écriture, parlant du baiser dont le plaisir serait le motif, ajoute : « Il faut donner avec la plus grande précaution le baiser ou plutôt la salutation, parce qu’elle nous exclut de la vie éternelle, pour peu qu’elle souille la pensée. »

XXXIII. Ainsi, mettant toute notre espérance dans la vie éternelle, nous méprisons toutes les choses de ce monde et jusqu’aux plaisirs de l’esprit ; nous n’épousons des femmes selon vos lois que dans la vue d’avoir des enfants ; de même que le laboureur, après avoir confié la semence à la terre, attend la moisson sans en répandre une nouvelle ; ainsi la procréation des enfants est la mesure de nos plaisirs ; vous trouverez même parmi nous grand nombre d’hommes et de femmes qui vieillissent dans le célibat, pour rester plus étroitement unis à Dieu.

Si donc nous pensons que la virginité et l’état du célibat nous rapprochent davantage de Dieu, et que la volupté et la pensée même du mal nous en éloignent, à combien plus forte raison ne devons-nous pas détester des actions dont l’idée seule nous fait horreur ; car la vie des Chrétiens ne se renferme pas dans de simples méditations de la parole divine, elle se manifeste par la pratique et l’exemple ; chacun reste tel qu’il est né, c’est-à-dire ne se marie point, ou ne se marie qu’une fois ; à nos yeux les secondes noces ne sont qu’un honnête adultère. « Quiconque, dit notre Seigneur, renvoie sa femme et en épouse