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voit même ce qu’il y a de plus caché dans nos cœurs ; qu’il est tout lumière ; quand nous sommes persuadés qu’après cette vie mortelle nous aurons une vie meilleure, une vie toute céleste (puisque nos âmes seront en Dieu et avec Dieu dans le Ciel, qu’elles ne seront plus sujettes au changement ni à la souffrance, ni dominées par la chair, bien qu’elles doivent être réunies à leur corps, et qu’elles auront tous les avantages des esprits célestes) ; ou bien que si nous nous laissons entraîner par l’exemple des méchants, cette autre vie sera plus malheureuse que cette vie présente, puisque nous serons précipités dans des flammes éternelles (car Dieu ne nous a pas créés comme les animaux et les bêtes de somme pour paraître un instant et disparaître sans retour), est-il vraisemblable qu’avec de semblables croyances nous préférions faire le mal et tomber entre les mains redoutables du souverain juge ?

XXXII. Il ne faut pas s’étonner si nos ennemis nous imputent les crimes qu’ils attribuent à leurs dieux, dont ils célèbrent les passions sous le nom de mystères. Mais du moins, puisqu’ils réprouvent si fort en nous les unions incestueuses formées dans l’ombre et au hasard, ils auraient dû montrer d’abord leur aversion pour Jupiter, qui eut des enfants de Rhéa, sa mère, et de sa fille Proserpine, et qui épousa sa propre sœur ; ou condamner Orphée, l’inventeur de ces turpitudes, cet Orphée qui nous a représenté Jupiter plus infâme que Thyeste lui-même. Car ce dernier, en souillant sa propre fille, ne fit qu’obéir à un oracle qui lui assurait que c’était le seul moyen de se venger et de conserver son royaume. Pour nous, nous sommes si éloignés de semblables crimes, qu’il ne nous est pas même permis de regarder une femme avec un mauvais désir ; « celui qui regarde une femme avec la pensée du mal, dit notre maître, a déjà commis l’adultère dans son cœur. » Comment seraient-ils des impudiques, ceux qui ne se servent de leurs yeux que pour éclairer le corps, selon l’intention du créateur ; ceux, dis-je, qui se croient comptables devant Dieu non-seulement de leurs actions, mais encore de leurs pensées, et pour qui un regard trop complaisant est un adultère, parce que les