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l’argile est à l’égard du potier ? L’argile est la matière, le potier est l’ouvrier.

L’argile par elle-même ne peut se convertir en vases sans le secours de l’art, de même que la matière capable de recevoir toutes les formes n’aurait reçu, sans Dieu, ni forme, ni figure, ni ornement. Si donc nous ne mettons point le vase de terre au-dessus du potier, ni les vases d’or au-dessus de celui qui les a faits ; mais si nous louons l’ouvrier quand il a su donner quelque élégance à ces vases, et si tout le mérite de l’œuvre revient à l’ouvrier, ne devons-nous pas aussi, quand il s’agit de la matière et de Dieu, attribuer non pas à l’ouvrier l’honneur et la gloire des merveilles du monde, mais bien à Dieu, qui créa la matière elle-même ? On aurait raison de dire que nous ne connaissons point le vrai Dieu, si nous faisions autant de dieux qu’il y a de formes différentes dans la matière ; car alors nous confondrions l’Être suprême, incorruptible et éternel, avec la matière périssable et sujette à la corruption.

XVI. Ce monde, sans doute, est admirable, soit par sa grandeur, puisqu’il embrasse tout, soit par la disposition des astres qui sont dans le zodiaque et de ceux qui roulent autour du pôle, soit enfin par sa forme sphérique ; ce n’est point lui cependant, c’est son auteur qu’il faut adorer. En effet, grands princes, les sujets qui vous abordent pour vous demander quelque grâce ne s’arrêtent pas à contempler la magnificence de votre palais : avant de saluer les maîtres dont ils viennent implorer le secours, ils se contentent de jeter un coup d’œil en passant sur la demeure royale ; ils en admirent les riches ornements, tandis qu’ils vous rendent à vous-mêmes toutes sortes d’honneurs ; encore faut-il remarquer cette différence, que vous, princes, vous bâtissez et décorez vos palais pour votre propre usage, tandis que Dieu a créé le monde sans en avoir aucun besoin. Car il est lui-même toutes choses, lumière inaccessible, monde parfait, esprit, puissance et raison. Ainsi donc, que le monde soit, si l’on veut, un instrument harmonieux, dont le mouvement est parfaitement ré-