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je vous dis : Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous persécutent et vous calomnient, afin que vous soyez des enfants de votre Père qui est dans les cieux, qui fait lever son soleil sur les bons et sur les méchants, et pleuvoir sur les justes et sur les injustes. » En plaidant notre cause devant des princes philosophes, qu’il me soit permis d’élever la voix et de m’écrier librement : Parmi tous ces grands savants si habiles à détruire les sophismes, à éclaircir les équivoques ; parmi ces grammairiens qui donnent l’étymologie des mots, qui enseignent les homonymes et les synonymes, les catégories et les axiomes, ce que c’est que le sujet, ce que c’est que l’attribut, et qui, avec tout cet étalage de science, promettent le bonheur à ceux qui les écoutent, en trouvez-vous beaucoup qui mènent une vie si pure, si vertueuse, que loin de haïr leurs ennemis, de maudire ceux qui les ont maudits les premiers, ce qui serait déjà faire preuve d’une grande modération, ils les aiment, ils les bénissent et prient pour ceux qui leur dressent des embûches ? Au contraire, ne sont-ils pas occupés jour et nuit à chercher dans leur art le secret de leur nuire, à leur tendre des piéges et à tramer leur perte ? Ils montrent par là que c’est l’art de bien dire qu’ils professent, et non l’art de bien faire. Mais regardez les Chrétiens, vous trouverez chez eux des ignorants, des artisans, de vieilles femmes qui ne peuvent, il est vrai, démontrer par le raisonnement la vérité de leur doctrine, mais qui vous en persuaderont l’excellence par la sainteté de leur vie ; car ils ne se répandent point en belles paroles, mais ils font briller leurs œuvres : ils ne frappent point celui qui les frappe, ils n’intentent point de procès à celui qui les dépouille, ils donnent à ceux qui demandent, ils chérissent le prochain comme eux-mêmes.

Et quoi ! Pensez-vous donc que nous aurions tant à cœur l’innocence et la pureté, si nous n’étions persuadés qu’un Dieu est témoin de toutes nos actions ? Non sans doute ; mais parce que nous sommes convaincus que nous rendrons compte de toutes nos œuvres au Dieu qui nous a créés, nous et le monde,