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qui rejette bien loin toutes les fables religieuses de l’antiquité, et en même temps, docile à la politique d’Auguste, il place dans le séjour des peines éternelles celui qui méprise les dieux.

Ovide, mêlant les fables superstitieuses à la fable philosophique de Pythagore, a recueilli les histoires confuses des dieux, rassemblé les nombreuses amours de Jupiter, et fait de la terre non-seulement le modèle, mais le théâtre de tous les vices des dieux. Un siècle auparavant, Térence mettait sur la scène un jeune homme qu’un tableau de Jupiter encourage au plaisir, et qui se sent à la fois animé et justifié par cette vue.

Ainsi, dans toutes les productions de la littérature, médailles incontestables de l’esprit d’un peuple, on trouve les signes de la décrépitude et de la ruine du polythéisme sous le règne d’Auguste. Le seul écrivain de cette époque, qui paraisse conserver un respect grave et patriotique pour les anciennes croyances de l’état, Tite-Live, en rappelant dans son histoire quelques témoignages de l’esprit religieux des anciens généraux, a soin d’avertir, avec un regret amer, que ces exemples datent d’un autre siècle, avant le triomphe de la philosophie nouvelle qui méprise les dieux.

La piété de ces premiers Romains, que regrettait Tite-Live, se confondait avec leur amour de la gloire et de la patrie. Leur mort sur le champ de bataille était une offrande aux dieux : rien surtout n’avait plus profondément imprimé la religion dans ces âmes simples et belliqueuses, que le continuel usage des augures et des auspices. Ces prédictions de victoire, si souvent accomplies, remplissaient les Romains d’une orgueilleuse superstition. Les entrailles des victimes, le chant ou le vol des oiseaux, toutes ces minutieuses observances que la guerre entretenait sans cesse, formaient autant de puissantes habitudes pour la foi des soldats. Vainqueurs, ils croyaient à des dieux dont ils se sentaient protégés ; vaincus, ils attribuaient le revers de leurs armes à des auspices négligés ou mal compris. Le camp était un temple ; et plus la vie guerrière occupait alors de place chez les Romains, plus les croyances