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de Neptune ; Saturne dévore ses enfants ; Jupiter engloutit Métis.

XXVI. Cessez donc de faire parade de doctrines étrangères et de vous orner, comme le geai, de plumes qui ne vous appartiennent point. Si chaque ville venait vous redemander les mots de votre langue que vous lui avez empruntés, vos sophismes crouleraient. Tandis que vous cherchez ce que c’est que Dieu, vous ignorez ce qui se passe en vous-mêmes, et, en regardant le Ciel avec extase, vous tombez dans des précipices. Vos livres sont semblables à des labyrinthes sans issue, et ceux qui les lisent peuvent être comparés aux tonneaux des Danaïdes. Pourquoi divisez-vous le temps en diverses périodes, comme le présent, le passé, le futur ? Comment le futur pourra-t-il s’écouler, puisque le présent existe ? Comme des navigateurs sans expérience qui s’imaginent que c’est le rivage qui marche, et non leur vaisseau, vous ne songez point que c’est vous-mêmes qui passez, tandis que le temps reste immuable, jusqu’à ce que celui qui l’a fait commande qu’il s’anéantisse. Pourquoi m’accuse-t-on, lorsque j’expose ma doctrine, et s’efforce-t-on de la combattre ? N’êtes-vous point nés de la même manière que nous, et ne participez-vous pas comme nous à l’ordre établi dans ce monde ? Pourquoi dites-vous qu’il n’est point d’autres sages que vous-mêmes, puisque vous n’avez point un autre soleil ni d’autres astres, puisque vous avez la même origine et la même destinée que les autres hommes ? Les gens de lettres ont commencé ce système de ridicules croyances ; en divisant la sagesse, vous vous êtes éloignés d’elle, et vous avez attribué aux hommes le nom de toutes les parties qui la composent. Ainsi, dans l’ignorance où vous êtes du vrai Dieu, vous ne cessez de vous combattre et de vous détruire les uns les autres. C’est pourquoi, tous tant que vous êtes, vous n’êtes absolument rien ; et quoique vous vous attribuiez vos doctrines comme si elles étaient de vous, vous n’êtes que des aveugles qui dissertent avec des sourds. À quoi bon ces instruments dans vos mains, puisque vous ne savez pas vous en servir ? Pourquoi ces longs discours, puisque vous êtes si éloignés de les mettre en pratique ; car vous vous laissez également abattre par le malheur et enfler par la prospérité ? Tous vos actes ont toujours une apparence de déraison, et vous reléguez dans le coin de nos écoles vos belles doctrines que vous démentez en venant étaler votre faste en public. Aussi vous avons-nous abandonnés lorsque nous vous avons connus ; nous ne voulons rien de ce qui vous appartient, et nous suivons le Verbe de Dieu. Pourquoi, je vous le demande, exciter ces guerres de