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sur parole ; Platon, tout en faisant le philosophe, se vend à Denys pour satisfaire sa propre gourmandise ; Aristote, qui eut la folie d’assigner des limites à la Providence, et la folie plus grande encore de circonscrire le bonheur dans le cercle étroit des choses qui lui plaisaient, Aristote se fit le lâche complaisant d’Alexandre, oubliant que c’était un jeune homme à conduire. Aussi le disciple, fidèle aux leçons du maître, faisait-il traîner à sa suite, enfermé comme un ours ou un léopard, un ami qui avait refusé de l’adorer. Sans doute encore ce prince ne faisait qu’obéir aux préceptes qu’on lui donnait, lorsqu’il montrait dans les festins son courage et sa force, et qu’il perçait d’un javelot le cœur de son ami le plus cher ; lorsqu’ensuite il pleurait, et, en signe de douleur, se laissait mourir faute de nourriture pour ne pas encourir la haine des siens. Je ne saurais m’empêcher de rire en voyant encore aujourd’hui les partisans d’Aristote, tandis qu’ils refusent d’étendre les soins de la Providence jusqu’aux choses sublunaires, se charger eux-mêmes de pourvoir à ce qu’ils prétendent ainsi être abandonné de Dieu, quoiqu’ils se trouvent bien au-dessous de l’orbite de la lune et bien plus rapprochés de la terre que cette planète. C’est encore Aristote qui a dit que l’homme ne pouvait être heureux sans la beauté, les richesses, la force du corps et la noblesse. Que de tels hommes philosophent tout à leur aise.

III. Je suis loin d’approuver Héraclite, qui, fier de ne devoir qu’à lui seul son savoir, disait avec arrogance : « Je me suis étudié moi-même. » Je ne l’applaudirai point non plus quand il cache un poëme dans le temple de Diane, pour le produire ensuite comme un ouvrage mystérieux ; car on dit qu’Euripide, qui avait coutume de venir souvent dans ce lieu et d’y lire, fit connaître à la postérité le ténébreux ouvrage d’Héraclite qu’il avait découvert. Mais la mort de ce philosophe ne prouve que trop sa folie : étant attaqué d’une hydropisie, et traitant la médecine comme il avait traité la philosophie, il se roula dans des excréments de bœuf et périt misérablement dans le fumier qui s’était durci et qui déchirait son corps. N’écoutons pas non plus Zénon, qui soutient qu’après l’incendie général qui doit avoir lieu les mêmes hommes renaîtront de nouveau pour les mêmes destinées ; c’est-à-dire, Anytus et Mélite pour être accusateurs, Busiris pour égorger ses hôtes, et Hercule pour recommencer ses combats et ses longs travaux.

Certes, par le moyen de cet incendie, il ramène sur la terre plus de méchants que de justes, puisqu’il n’y a eu qu’un Socrate, qu’un Hercule, et que leurs imitateurs ont été bien rares ; car on trouve bien plus de méchants que de bons. Selon lui encore, Dieu