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mandent l’impossible, ou à l’ancienne Église qui ne lui demande que ce qui convient à son impuissance et à la bonté de Dieu ? « Représentons-nous un paralytique qui veut sortir de son lit, parce que le feu est à la maison. Il s’adresse à cinq hommes qui lui disent : Levez-vous, courez, percez la foule et sauvez-vous de cet incendie. Enfin, il trouve un sixième homme qui lui dit : Laissez-moi faire, je vais vous emporter dans mes bras. Croira-t-il les cinq hommes qui lui conseillent de faire ce qu’il sent bien qu’il ne peut pas ? Ne croira-t-il pas plutôt celui qui est le seul à lui promettre le secours proportionné à son impuissance ? Il s’abandonne sans raisonner à cet homme, et se borne à demeurer souple et docile entre ses bras. Il en est de même d’un homme humble dans son ignorance. Il ne peut écouter sérieusement les sectes qui lui crient : Examinez, discutez, décidez, lui qui sent qu’il ne peut ni examiner, ni discuter, ni décider. Mais il est consolé d’entendre l’ancienne Église qui lui dit : Sentez votre impuissance, soyez docile, confiez-vous à la bonté de Dieu qui ne vous a pas laissé sans secours pour arriver à lui. Laissez-moi faire, je vous porterai dans mes bras[1]. »

Rien n’est plus simple et plus court, rien n’est plus proportionné à la faiblesse humaine, à la condition des classes laborieuses, que ce moyen d’arriver à la vérité. Disons aussi qu’il convient à tout le monde sans exception, aux savants comme aux ignorants, aux esprits cultivés par les lettres comme à ceux qui ne le sont pas ; car ce qui conduit les uns à la vérité ne peut pas conduire les autres à l’erreur. Et d’ailleurs, quel est l’homme, quelque intelligent qu’il se croie, qui ne sente pas et ne confesse pas, s’il a de la bonne foi, l’impuissance où il est de décider par lui-même tant de questions controversées et des questions si hautes, qu’elles dépassent et confondent toutes les intelligences humaines ? Quel est l’homme

  1. Fénelon, troisième Lettre sur divers sujets de métaphysique et de religion.