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Lum. Et pourquoi ? Auriez-vous de l’inquiétude ſur l’élection qui doit ſe faire ce ſoir ?

Roſ. Oh, non, point du tout, ce n’eſt pas cela ; & ce qui m’occupoit quand vous êtes entrée, ne mérite pas. —

Lum. N’importe, je veux ſavoir.

Roſ. Eh bien, Madame, c’eſt cette jeune perſonne que vous venez de placer auprès de moi.

Lum. Elle ne vous convient pas ?

Roſ. Je n’ai pas bonne opinion de ſon caractère ; ſi vous ſaviez avec quelle fadeur, avec quelle baſſeſſe elle me louoit.

Lum. Oh, ce n’eſt que cela ; mais, mon enfant, votre modeſtie vous fait prendre pour des flatteries la ſimple vérité, je vous aſſure ; je vous le dis naturellement, je ſuis fière de mon ouvrage, & ſur-tout à l’éducation que je vous ai donnée, vous êtes une perſonne réellement accomplie.

Roſ. Accomplie ! Eh bien, Madame, de bonne foi, je ne crois pas cela.

Lum. Je le fais bien, & voilà ce qui prouve la perfection de mon ouvrage ; car ſi vous vous rendiez justice, il vous manqueroit une vertu.

Roſ. Cependant j’ai beaucoup d’orgueil.

Lum. (en riant.) Oui, mon enfant, ſoyez toujours bien perſuadée de cela.

Roſ. (vivement.) Oui, Madame, j’en ai beaucoup ; & puiſque vous me forcez de le dire, je ne trouve perſonne qui me ſoit préférable ; par exemple, eſt-ce là être modeſte ? — Vous riez, vous croyez que j’exagere ; non, je dis