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les loix, on formeroit un Conſeil des Vieillards & des Sages de cette Iſle, afin qu’à la pluralité des voix, il pût choiſir entre nous deux celle qu’il jugeroit la plus digne d’être élue Reine.

Zul. Mais, Madame, par votre naiſſance, n’êtes vous pas plus près du trône ?

Ros. Non, les droits de Clarinde à cet égard ſont encore les mêmes ; nous étions du ſang de la feue Reine, mais à un degré ſi éloigné, que les preuves de part & d’autre en ſont également obſcures ; la Reine n’ayant pas d’autres héritiers, ne voulut pas prononcer entre nous ; & cependant par les ſages diſpositions que je viens de vous détailler, elle trouva le moyen d’accorder une juſte préférence, puiſqu’elle ne laiſſe ſes États qu’à la plus digne de les gouverner !

Zul. Ah, Madame, que cette diſpoſition fut heureuſe pour vous !

Ros. Fort bien. Zulmée ; je vous paſſe cette flatterie, elle n’eſt pas mal tournée ; mais revenez-y rarement, les louanges n’ont pas toujours le don de me plaire ; cependant je les aime, je l’avoue, mais j’y ſuis fort difficile, je vous en avertis.

Zul. Quand on oſe vous en donner, c’eſt ſans projet ; elles échappent, il faut bien que vous les pardonniez.

Ros. Zulmée, vous avez de l’eſprit, j’entrevois que nous pourrons nous convenir — Avez-vous vu la Fée aujourd’hui ?

Zul. Non, Madame : elle eſt ſi occupée des préparatifs du couronnement — C’eſt pour vous qu’elle travaille.