Mel. Eh vraiment, oui, & qui nous tiendra juſqu’à quatre heures, & je veux aller à l’Opéra nouveau, car j’ai ma loge. Lucie va venir prendre ſes leçons, vous lui direz que ſi vous êtes contente d’elle, je la menerai à l’Opéra. Adieu, ma chere Dorine, n’oubliez pas cet entretien, & justifiez par votre conduite toute la confiance que j’ai en vous. (Elle ſort.)
SCENE ii.
DORINE, ſeule.
uelle folie ! — parfiler, aller aux ſpectacles,
recevoir des viſites, voilà toutes ſes
occupations. Elle vante ſans ceſſe à ſa niece
les charmes de l’étude & l’utilité de l’application ;
& l’exemple qu’elle lui donne, eſt éternellement
en contradiction avec ſes diſcours.
Et puis dans d’autres moments, n’écoutant
qu’une aveugle tendreſſe, elle croit ſa niece un
petit prodige de perfections, & la loue avec excès :
& tout le monde, pour lui plaire, en dit
autant : mais quand Mélanide a le dos tourné,
quelles moqueries ne fait-on pas de cette petite
fille, qui, en effet, vaine, indocile, étourdie,
n’apprendra jamais rien ! Au reſte, que m’importe ?
je la flatte, je lui paſſe ſes caprices, je
m’en fais aimer ; elle ſe mariera, ſera riche,
fera ma fortune, voilà l’eſſentiel. Mais paix,
j’entends quelqu’un ; ah ! c’eſt Lucie.