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Bien. Non, ma ſœur, l’intérêt perſonnel ne me rendra jamais injuſte.

Lum. En effet, ma ſœur, j’aime Roſalide comme vous aimez Clarinde ; ainſi ſongez que je ne puis éprouver qu’avec tranſport l’eſpérance qui m’eſt rendue.

Bien. Ce ſentiment eſt naturel ; d’ailleurs Roſalide, à beaucoup d’égards, mérite votre tendreſſe ; je ne blâme en elle que ſes caprices & ſa vanité : mais elle a de l’ſprit ; & ſi ſon cœur eſt bon, elle pourra facilement ſe corriger de ſes défauts.

Lum. Ah ! ſon cœur eſt excellent, n’en doutez pas.

Bien. Je le crois, & j’ai vu d’elle aujourd’hui pluſieurs traits qui me le perſuadent.

Lum. Vous me charmez. — Ah, ma ſœur, cette inaltérable bonté, cette équité parfaite que vous poſſédez au ſuprême degré, attire & ſubjugue toute ma confiance ; eh bien, je crois dans cet inſtant que c’eſt Roſalide qui l’emportera ſur Clarinde ; mais vous m’avez ouvert les yeux, & je vois que l’éducation que vous avez donnée à votre éleve, la rend en effet plus digne du trône. Trop de vanité m’égara : j’ai voulu que Roſalide fût admirée, je n’ai tournée ſon amour-propre que ſur des objets frivoles ; & ſans doute tous ſes défauts ſont mon ouvrage, je le ſens, je l’avoue ; mais cependant dans ce moment même où je me condamne, elle eſt peut-être couronnée ! Clarinde eſt adorée par ſa bienfaiſance, elle a mille vertus ; mais celles de Roſalide, quoique moins