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AUTEUR.

trant qu’elle avoit employé tout son temps à l’aprendre par cœur, mais elle n’avoit pas prévu que son attendrissement la trahiroit. Elle chantoit devant un spectateur redoutable et clair-voyant (un mari jaloux). Le comte de Nangis remarqua son trouble, et en écoutant les paroles, il se confirma dans ses soupçons. Ayant chanté le premier couplet d’une voix mal assurée, madame de Nangis s’embarrassa davantage au second, et jetant un coup-d’œil timide sur le comte de Nangis, elle fut si effrayée de l’altération de ses traits, qu’elle perdit tout-à-fait la tête ; sa voix s’éteignit et elle s’arrêta… Le comte de Nangis ne se possédant plus, s’approcha d’elle, et la regardant avec des yeux où se peignoit la fureur : Je serois curieux, dit-il d’un ton ironique et d’une voix entrecoupée, de connoître l’auteur de cette romance ? À ces mots, Natalie qui avoit tout observé et tout compris, fit un éclat de rire en s’écriant : Eh bien ! monsieur, c’est moi. À cette réponse, Germeuil tressaille, tout le monde s’étonne, et Natalie, avec le même naturel et