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LE BONHOMME.

avec le maintien de la tristesse et de la confusion. « En vérité, dit Isaure, quand vous l’auriez bien grondé, il ne seroit pas plus affligé. — Il le seroit beaucoup moins. — Cependant se peut-il qu’un domestique ait assez de générosité naturelle, pour n’abuser jamais de cet excès de douceur et d’indulgence ? — Peut-on avoir trop d’indulgence pour des fautes involontaires, qui ne sont, par elles-mêmes, que des minuties ? Peut-on se fâcher sérieusement ? peut-on maltraiter, humilier son semblable, pour l’oubli d’une bagatelle ?… — Mais le devoir de son état est d’être exact… — Son devoir principal est d’être fidèle, sincère, affectionné ; il le remplit. — J’admire vos sentimens, mais je pense avec peine qu’il en résulte que vous êtes plus mal servi qu’un maître impérieux ou sévère ne le seroit. — Je ne le crois pas : le maître sévère ne gronde-t-il pas souvent ? — Assurément. — Il en a donc sujet ; on a donc avec lui, ainsi qu’avec moi, des oublis, des distractions, et tous ces petits torts inévitables. Il se fâche, il s’agite, il se fait haïr ; on le trompe : voilà tout ce