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L’AMANT

il se rappeloit les sourires de Léontine. Peut-on sourire ainsi, se disoit-il, à celui qu’on n’aime pas, et quand on en aime un autre ! Quoi ! cette expression si tendre, et qui paroît si naïve, n’est qu’une mine, ou pour mieux dire, un piège ! quelle coquetterie, quelle fausseté !… Voilà les Françaises !… Ah ! pourquoi faut-il que tant de graces soient réunies à tant d’artifices !…

Rosenthall se coucha de très-bonne heure, afin de se débarrasser de toute conversation, et ne pouvant dormir, il se leva avec le jour. Cependant il se promit de dissimuler son chagrin, et d’employer toute sa raison à se guérir d’un sentiment sans espérance, et son dépit même lui persuada qu’il ne lui seroit pas difficile de surmonter un penchant si nouveau. Il prit la résolution de montrer à Léontine beaucoup d’insouciance et de légèreté ; il ne s’avouoit pas qu’il avoit envie de l’étonner et de la piquer ; mais il trouvoit, dans ce projet, la seule consolation qu’il pût recevoir.

À dix heures du matin on vint annon-