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LA PRINCESSE

de savoir s’ennuyer. La princesse des Ursins disposoit souverainement de toutes les places ; les ministres faisoient un travail particulier dans son cabinet. Elle paroissoit avoir l’esprit des affaires, elle avoit, plus d’une fois, donné des avis utiles ; elle étoit guidée à cet égard par un homme obscur alors, qu’elle consultoit en secret sur les délibérations du conseil d’état. Cet homme étoit l’abbé Alberoni, fils d’un paysan de la Toscane, mais ayant fait de bonnes études : né avec un génie entreprenant, une ardente ambition, un esprit délié, et le caractère le plus artificieux, il avoit trouvé le moyen de parvenir jusqu’à la favorite et de gagner sa confiance. Un extérieur simple et même un peu grossier, un ton presque brusque, servent souvent mieux un intrigant spirituel, que les manières agréables et les grâces dont on se défie, sur-tout à la cour. Alberoni avoit cette apparence de rusticité assez adoucie, cependant, par la politesse, pour qu’elle ne fût ni choquante, ni ridicule. Dans le commerce intime