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LE MALENCONTREUX.

dée à me donner sa main, elle éprouvoit cet embarras modeste qu’une jeune fille ressent toujours au moment de s’engager pour jamais. Je me confirmai dans cette idée, en voyant miss Lucy devenir chaque jour plus timide avec moi ; elle osoit à peine me regarder et me répondre. Je respectai cette pudeur ; je cessai de m’approcher de miss Lucy, et de chercher à lui parler en particulier ; enfin, je me tins constamment à l’écart. J’eus lieu de m’applaudir de cette réserve : miss Lucy m’en remercia d’une manière si obligeante, et même si tendre ; elle loua tellement ma délicatesse, que je fus persuadé que j’avois achevé dans cette occasion, de gagner entièrement son cœur. Florzel alloit très-assidûment chez M. Merton ; je lui en savois d’autant plus de gré, qu’il repoussoit tous mes remercîmens à cet égard ; il ne vouloit plus me donner de conseils ; il m’avoit avoué qu’extrêmement préoccupé, son cœur étoit vivement combattu. Je lui connoissois une intrigue d’amour : j’imaginaique sa peine secrète venoit de cette liaison traversée,