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LE MALENCONTREUX.

pour ne le pas brusquer. Mais je recevois toutes ses saillies avec une froideur glaciale, ce qui lui donnoit certainement fort mauvaise opinion de mon esprit.

Quelques jours après, j’introduisis mon ami Florzel chez M. Merton ; le docteur y étoit, qui, voulant déployer toutes ses graces aux yeux d’un jeune français très-aimable, fut plus ridicule que jamais ; et Florzel, loin d’en paroître étonné, eut l’air d’être charmé de lui, et se mit à rire si naturellement, que je commençai à croire que j’avois tort en trouvant le docteur ennuyeux ; car dans toutes les choses de ce genre, j’avois beaucoup plus de confiance en Florzel qu’en moi-même. En sortant de chez M. Merton, je m’empressai de demander à Florzel comment, au vrai, il trouvoit le docteur ? Insoutenable, me répondit-il. Comment, repris-je, et tu recevois ses insipides plaisanteries avec une gaîté si bien jouée ?… Je ne jouois rien, interrompit Florzel, je riois de très-bon cœur, car je suis pour les ridicules, comme le philosophe Démocrite étoit pour les vices, je m’en amuse beau-