Page:Genlis - Nouveaux contes moraux et nouvelles historiques, tome 2, 1804.djvu/450

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

il se forma une conjuration de toute la société pour favoriser les desseins du chevalier qui, sans avoir de confident, fut parfaitement servi et secondé, surtout par les femmes. À la vérité, personne n’imaginoit (à l’exception de la baronne) que la fière, la froide, la prudente madame de Nelfort pût faire la folie d’épouser un jeune homme de vingt-six ans, étourdi, léger, dissipateur et ruiné. Mais on se disoit malignement : il sera plaisant de voir une prude, à trente-trois ans, prendre pour premier amant, un homme de cette tournure !… Depuis long-temps, l’excellente réputation de madame de Nelfort, importunoit tant de femmes !… Madame de Nelfort étoit loin de soupçonner cette espèce de complot tacite, elle ne voyoit dans tout ce qu’on lui disoit du chevalier, que de la vérité et de la justice. Mais elle commença à s’effrayer des sentimens qu’elle éprouvoit. Il m’aime, disoit-elle, je n’en saurois douter… il a exposé sa vie pour me rendre Rosette, que ne feroit-il donc pas pour moi !… Pauvre jeune homme ! qu’il est touchant !