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bre à côté de la sienne. Delrive, âgé de vingt-six ans, rempli d’esprit, d’une figure charmante, et ayant reçu la plus parfaite éducation, étoit pour tout le monde une société agréable, et surtout pour un vieillard accablé de regrets, d’inquiétudes et d’infirmités. Il invitoit tous les jours Delrive à déjeûner ; et un matin, le questionnant plus vivement qu’à l’ordinaire sur sa profonde mélancolie, Delrive consentit enfin à lui conter son histoire, ce qu’il fit à peu près dans ces termes :

« Vous quittâtes la France dès la seconde année de la révolution. Mon père, alors, se retira en province ; je l’y suivis, et lorsque la guerre se déclara, je partis pour les armées. J’y restai jusqu’au mois de février 1793. À cette époque j’eus un congé ; j’allai passer quinze jours avec mon père. Ensuite, par son ordre, je fus à Paris pour y terminer quelques affaires. Je logeois ordinairement, dans mes petits voyages à Paris, dans la rue Taranne, chez une femme nommée madame Martin. Je m’y rendis, elle me