Page:Genlis - Nouveaux contes moraux et nouvelles historiques, tome 2, 1804.djvu/212

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que le loup faisait à l’agneau[1]. Sans rien changer à ses mœurs, il avoit pris un langage un peu différent. D’athée il étoit devenu sceptique, c’est toujours une sorte de conversion. Il s’étoit beaucoup moqué, jadis, de l’éducation religieuse que l’on avoit donnée à Delrive ; il vit avec plaisir que Delrive n’étoit plus le même ; quoique détaché de la philosophie, cependant, par un reste d’habitude, il regardoit ce changement comme une espèce de victoire, et il en aima mieux Delrive. M. d’Orselin étoit excessivement égoïste, et par conséquent avare, depuis qu’il ne possédoit plus une fortune immense. Ne pouvant plus briller par le faste, il affectoit une grande pauvreté ; il avoit un logement commode, mais très-modeste, et pour tout domestique une jeune servante. L’ennui et un intérêt secret lui donnèrent le désir de s’attacher Delrive qui, seul, et ayant apporté quelqu’argent, ne pouvait pas lui être fort à charge. Il lui offrit une cham-

  1. Lettres de Voltaire.