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En effet, le dîner parut avec éclat ; il fut dévoré avec autant d’appétit que de gaîté ; on jeûnoit depuis quatre jours, et l’on devoit aux soins de Laure cet excellent repas !… Depuis cette époque Laure, devenue par nécessité une bonne ménagère, ne manqua point de descendre chaque matin dans la cuisine, pour présider quelques momens au dîner, et pour commander celui du lendemain.

À l’égard des deux villageoises picardes, transformées subitement en femmes-de-chambre, elles furent d’autant plus gauches les premiers jours, qu’elles joignoient à leur ignorance une horrible frayeur de leur jeune maîtresse, dont on leur avoit fait le portrait le moins rassurant. Dès qu’elles s’apercevoient qu’elles avoient manqué à quelque chose, elles pâlissoient, tressailloient, ou bien elles se sauvoient à toutes jambes, et communément alors, elles alloient se cacher de manière qu’il falloit s’en passer pendant des heures entières. Hippolyle, qui se trouvoit toujours à la toilette de Laure, ne manquoit pas de la louer à toute mi-