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le comte, dans ma folie j’ai jeté tout ce qui étoit dans la cuisine, il n’y a plus rien de cuit ; mais je vais chercher du lait ou du fruit. Hippolyte sort, et au bout d’un quart-d’heure Laure entend un train affreux, et reconnoît la voix terrible d’Hippolyte en fureur. Elle recommence à s’effrayer ; Hippolyte revient : on a tout mangé, lui dit-il ; comme j’avois gâté le premier souper, il en a fallu un second ; tout le monde s’est jeté sur ce qui restoit : voilà tout ce que j’ai pu avoir, et il montroit un morceau de pain rassis de fort mauvaise mine. — C’est bon, c’est bon, dit Laure ; c’est tout ce qu’il me faut. — Vous aurez du fruit, reprit Hippolyte, j’ai envoyé tous les domestiques en cueillir dans le jardin. — Non, non, dit Laure, ce pain me suffit, il est excellent. Hippolyte protesta qu’il ne souffriroit pas qu’elle se couchât sans manger, au moins deux ou trois bonnes pêches ; et il s’agitoit, s’impatientoit de la lenteur des domestiques, les appeloit, crioit à tue-tête, sonnoit toutes les sonnettes, et désoloit la pauvre Laure. Il étoit une