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LE MALENCONTREUX.

j’étois étranger, et me parla en français. Comme il n’avoit aucun accent, je le reconnus aussitôt pour un compatriote ; je lui sautai au cou ; il m’accueillit avec une extrême cordialité ; et, après un demi-quart-d’heure de conversation : « Voyez-vous, me dit-il, au-delà du lac, cette jolie petite île, située en face de cette chapelle ? Eh bien ! c’est mon asyle ; ces ruines, ces débris d’un vieux château, sont les restes de l’habitation du tyran dont Guillaume Tell délivra son pays : j’ai bâti mon hermitage au milieu de ces décombres ; je suis retiré, depuis dix ans, dans cette solitude ; si vous voulez la partager, et si vous aimez la retraite et la paix, suivez-moi[1] ». J’obéis avec re-

  1. Cette île s’appelle l’île de Schwanau ; elle contient en effet les restes d’un antique château qui, dit-on, appartint jadis à Griesler. De l’autre côté du lac, en face de l’île, se trouve le monument décrit par M. de Kerkalis ; enfin il est vrai aussi que l’île est habitée depuis dix ans par un hermite français qui a été successivement, dans sa jeunesse, valet-de-chambre de deux personnages aussi intéressans qu’infortu-