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LE MALENCONTREUX.

J’arrivai à Brest, si fatigué et avec le cœur si flétri, que j’en eus un violent accès de fièvre, qui me retint deux jours au lit.

D’après les conseils de mes amis je partis pour Paris ; j’y présentai une requête dans laquelle je réclamois la justice qui m’étoit due ; je représentai que je n’étois point émigré, qu’on m’avoit renvoyé sans nulle raison, et que je redemandois, sinon mon bien, du moins ma patrie. On ne fit nulle réponse à ce placet. Je restai encore quelque temps à Paris ; ensuite vint la révolution qui força tous les émigrés non rayés à s’enfuir précipitamment. On accourut m’avertir au milieu de la nuit que j’étois sur la liste des déportés ; j’eus le bonheur de pouvoir me sauver. Ce fut ainsi que je quittai la France. Je recueillis cependant quelques fruits de ce désastreux voyage : j’appri sà mieux apprécier encore ma charmante chaumière de Pageroë. Une surprise bien agréable m’attendoit à Hambourg, j’y trouvai M. Merton et la comtesse de Florzel, sa fille, qui, malade et séparée de son mari, venoit chercher sur le continent un air