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LE MALENCONTREUX.

bre, et vouloit l’épouser : mais madame D*** ne l’aimoit pas, et ne pouvoit se décider à donner sa main sans l’aveu de son cœur. Voilà le fond de ce nouveau roman, et madame D*** trouva le secret de faire durer ce récit plus d’une grande heure et demie. Pendant ce temps, excédé d’ennui, je changeois à tout moment d’attitude sur ma chaise, et j’étouffois de mon mieux les bâillemens qui me suffoquoient… Tout d’un coup, madame D*** me regardant d’un air attendri : Qu’avez-vous, me dit-elle, vous êtes agité, vous changez de visage… vos yeux se remplissent de larmes ?… — Ce n’est rien, répondis-je avec embarras… — Et pourquoi donc, reprit-elle, ce trouble singulier, cet air triste et contraint ? — J’ai un peu de mal à la tête. — N’est-ce que cela ?… Madame D*** fit cette dernière question, avec un ton de fausset si enfantin, un certain air doucereux et conquérant qui me parut si ridicule, que je ne pus m’empêcher de sourire. Mauvais sujet ! reprit-elle, en me donnant une petite