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LE MALENCONTREUX.

promenades où je ne pourrois aller habituellement sans fatigue ? N’est-il pas dans l’ordre, n’est-il pas naturel que l’homme qui n’occupe personnellement sur la terre qu’un si petit espace, ne desire point étendre son domaine au-delà des limites ou ses sens peuvent atteindre ?

Madame D*** me montroit une reconnoissance et des sentimens qui me charmoient ; elle m’assuroit qu’elle aimoit avec passion la solitude et la campagne ; elle partageoit avec moi, de la meilleure grace, tous les travaux domestiques ; elle surveilloit notre unique et vieille servante ; elle soignoit la laiterie et dénichoit les œufs de nos poules ; ensuite elle venoit causer avec moi, tandis que je travaillois au jardin. Je m’applaudissois d’avoir recueilli une personne intéressante, en qui je trouvois le charme d’une si douce société, et dont les goûts s’accordoient si bien avec les miens. Cependant, au bout de six semaines ou deux mois, je ne pus m’empêcher de remarquer en madame D***, plusieurs