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sement depuis un demi-siècle, et que l’on pourroit montrer maintenant sans indiscrétion, car assurément personne ne les reconnoîtroit. M. de Croy, bien loin d’être galant avec les jeunes personnes, les regarde et leur parle avec une froideur et une sécheresse qui vont jusqu’au dédain ; il n’a plus l’espoir des conquêtes : cela donne de l’humeur quand on avoit placé là tout son orgueil ; mais il vante avec extase les beautés célèbres de son temps, et ces éloges sont toujours mêlés de quelques épigrammes sur la jeunesse actuelle. Il a de la causticité ; il est sombre et mélancolique ; je le plains : que peut-il faire d’un amour-propre, ardent et désœuvré, qui ne sait plus où se prendre ? C’est un malheureux être qu’un vieil invalide de Cythère.

    Qui n’a pas l’esprit de son âge,
    De son âge a tout le malheur[1].


  1. Voltaire.