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LES ESCLAVES
OU LE POUVOIR DE LA BIENFAISANCE.

Snelgrave, capitaine de vaisseau anglais, était recommandable par son humanité. Il voyagea longtemps en Afrique[1], et y fit ce qu’on appelle la traite des nègres, commerce infâme que l’usage autorisait, mais que la nature et la raison réprouvent.

Snelgrave avait acheté beaucoup de nègres sur les bords de la rivière de Kallabar. Parmi ces infortunés, il remarqua une jeune femme qui paraissait accablée de douleur. Touché des larmes qu’il lui voyait répandre, il la fit questionner par son interprète ; il apprit qu’elle pleurait un enfant unique mort la veille. On la conduisit sur le vaisseau de Snelgrave, et le jour même, le chef ou roi du canton fit inviter Snelgrave à venir le voir. Snelgrave y consentit ; mais, connaissant la férocité de cette nation, il se fit accompagner de dix matelots bien armés et de son canonnier. À quelque distance de la côte, il trouva le roi assis sur un siège élevé, et entouré d’une nombreuse suite de nègres de distinction ; sa garde, composée d’environ cinquante hommes armés d’arcs et de flèches, et la zagaie à la main, se tenait derrière lui à quelque distance. Les Anglais, le fusil sur l’épaule, se rangèrent vis-à-vis du roi.

  1. Vers l’an 1722.