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loge de l’inconstance. Cependant il a prouvé qu’il étoit profondément sensible, et que le mérite uni à la grâce pouvoit le fixer. Il a épuisé, dans sa première jeunesse, tout ce que la légèreté, la plaisanterie ont de piquant, il a réservé la raison pour l’âge mûr : c’est lui donner toute l’autorité qu’elle peut avoir. J’ai déjà parlé de M. de Vaudreuil et de quelques autres, je vais reprendre le fil de ma narration.

Je fis, dans ce temps, une rencontre qui me combla de joie. Un matin que je me promenois au Palais-Royal, j’aperçus une femme de trente-sept ou trente-huit ans, qui se promenoit avec une très-jeune personne, et qui me regardoit avec une attention et une expression qui me frappèrent. Je l’examinai de mon côté, ses traits ne m’étoient point inconnus ; et, tout à coup je tressaille, et je m’écrie : « C’est mademoiselle de Mars ! » Elle vint à moi, me prit la main qu’elle serra fortement en me disant d’une voix entrecoupée : « Contenons-nous ici. À quelle heure pourrois-je vous revoir demain ? » À toute heure de la matinée, répondis-je. À ces mots, elle s’éloigna précipitamment, me laissant