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retenu à Sillery ; il conservoit de ce séjour le plus tendre souvenir. Il étoit dans la rue lorsque j’arrivai ; il me reconnut, il accourut avec empressement chez moi. Sa vue me rappela le temps le plus heureux de ma vie, et mes pleurs redoublèrent : il étoit sensible et bon ; il pleura de tout son cœur avec moi, car je lui appris la triste cause du dérangement de ma santé. De son côté il me conta qu’il s’étoit marié, et qu’il étoit à Spa avec sa femme, pour la santé de cette dernière, et pour toute la saison. Le soir même il m’amena madame Conway, qui étoit la meilleure personne du monde. Nous allâmes le lendemain ensemble déjeuner au Wauxhall ; et bientôt je m’accoutumai à Spa, et je finis par le trouver ce qu’il est, c’est-à-dire, un lieu charmant. Plusieurs personnes de ma connoissance y arrivèrent ; j’y fis beaucoup de musique, de longues promenades à cheval et sur les montagnes. Je me réservai constamment chez moi, tous les jours, cinq ou six heures d’une solitude absolue, que j’employois à dessiner des fleurs, à jouer de la harpe, et à composer. Je ne recevois personne chez moi, à l’exception de trois ou quatre fois où l’on y fit de la musique. Il