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sous la figure d’un ange, dont les ailes bleues se dessinoient sur la dorure, il me tendoit les bras !… Cette vision, sans me donner aucun soupçon de la vérité, me causa l’étonnement qu’on peut imaginer ; je me frottai les yeux à plusieurs reprises, et je vis toujours et constamment la même figure. Ma mère, M. de Genlis, et M. de Sauvigny vinrent à onze heures ; ils étoient accablés de douleur ; je ne fus point étonnée de leur profonde tristesse, je savois que j’étois malade de manière à donner une grande inquiétude. Comme il m’étoit impossible de ne pas regarder à toutes les minutes au ciel de mon lit, et avec un tressaillement involontaire, on me demanda plusieurs fois ce qui m’agitoit, j’éludai de répondre ; ma mère, sachant que je craignois les araignées, imagina que je croyois en voir une ; enfin, les questions ne cessant point, je répondis que je ne voulois point dire ce que je voyois, parce qu’on me croiroit le transport au cerveau, que je n’avois pas ; on me pressa davantage encore, et je dis la vérité. Le saisissement et la surprise furent au comble ; on prit un prétexte pour sortir de ma chambre, afin d’aller pleurer en liberté.