Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T2.djvu/243

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rié, il logeoit chez son frère, qui avoit pour lui la plus tendre amitié. Dès les premiers temps de ma liaison avec sa belle-sœur, il parut fort occupé de moi. Il avoit alors vingt-sept ou vingt-huit ans, une taille et une figure particulièrement élégantes ; on trouvoit son visage joli : il ne m’a jamais plu, parce que sa physionomie exprimoit habituellement l’ironie et la moquerie, et qu’il y avoit dans son regard je ne sais quoi de furtif, de faux et de méchant que je n’ai vu qu’à lui, et qui me paroissoit d’autant plus surprenant, qu’il étoit blond et qu’il avoit des yeux bleus, ce qui, ordinairement, donne l’air de la douceur. Il avoit de l’esprit, de la finesse, quelquefois de la gaieté, une jolie conversation, un ton parfait, et la réputation d’un jeune homme sage, instruit et très-aimable. Il avoit beaucoup lu, et surtout l’histoire de France et tous les mémoires qui s’y rapportent. Il en parloit bien et sans pédanterie. Quand je consultois ma raison et mon jugement, il me paroissoit digne des plus grands éloges ; quand je le regardois et que je l’observois, il me déplaisoit à l’excès. Il se piquoit d’aimer avec passion la musique : ce qui motivoit les trans-