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madame de Blot, et madame de Montboissier, son amie, parfiloient ; M. le duc de Chartres, et trois ou quatre hommes, alloient et venoient dans le salon. Je faisois une bourse. La conversation tomba sur la Nouvelle Héloïse de J.-J. Rousseau. Madame de Blot s’extasia sur cet ouvrage ; peu à peu son enthousiasme devint si emphatique et si bruyant, que M. le duc de Chartres et les hommes qui étoient avec lui, se rapprochèrent, en restant debout : ils firent un demi-cercle autour de notre table, et M. le duc de Chartres se plaça vis-à-vis de madame de Blot, qui en fut un peu embarrassée ; elle n’aimoit pas du tout à soutenir devant lui ses thèses sentimentales, sachant bien qu’il ne les écoutoit attentivement que pour s’en moquer ; cependant comme elle se sentoit en verve d’éloquence et de dissertation, elle continua avec le même feu, et elle s’anima tellement, qu’elle finit par dire qu’il n’existoit pas une femme véritablement sensible, qui n’eût besoin d’une vertu supérieure pour ne pas consacrer sa vie entière à Rousseau, si elle pouvoit avoir la certitude d’en être aimée passionnément. À cette étrange déclaration, M. le duc de Chartres s’écria qu’il nous de-