Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T2.djvu/236

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quand on craint l’inimitié des femmes ! Il a toujours été facile de m’intimider par la sécheresse et la froideur, mais l’impertinence a produit, de tout temps, en moi un effet tout contraire. Je le prouvai dès lors, au grand étonnement de tous ceux qui furent témoins de la scène que je vais rapporter.

Tous les jours de représentation d’opéra, la porte étoit ouverte à toutes les personnes présentées, qui pouvoient y venir souper sans aucune invitation. Les autres jours s’appeloient les petits jours ; il y avoit une liste pour la société intime, qui, invitée une fois, pour toutes, venoit à volonté. Nous étions quelquefois dix-huit ou vingt, et plus communément dix ou douze. Ces soupers étoient fort agréables : on n’y jouoit point ; la princesse et toutes les femmes, établies autour d’une table ronde, parfiloient ou travailloient à de petits ouvrages ; les hommes, assis à côté ou un peu derrière elles, soutenoient la conversation, qui, en général, étoit spirituelle et piquante. Un de ces soirs, après souper, je me trouvai placée entre monsieur de Thiars et le chevalier de Durfort ; madame la duchesse de Chartres, et plusieurs dames du Palais-Royal, entre autres