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nis. On n’a jamais vu, du moins dans ce temps, de bassesses effrontées, et c’est encore beaucoup ; jamais on n’a vu un ami supplanter à la cour son ami, ou un ministre disgracié abandonné lâchement par ceux qui lui avoient fait une cour assidue pendant sa faveur ; au contraire, comme le cœur et les principes avoient infiniment moins d’influence sur la conduite que la vanité, on mettoit du faste et de l’éclat à toutes les actions généreuses ; on finit par y mettre de l’arrogance : on ne se contenta pas d’aller voir un ministre exilé, on lui rendit une espèce de culte, on le déifia, on brava ouvertement le souverain qui l’avoit exilé…

On l’a déjà dit, le code moral de cette brillante société n’étoit plus appuyé que sur une base fragile, prête à s’écrouler ; mais il y avoit encore des législateurs et des juges, les lois n’étoient point abrogées. Cette grande société, ou la bonne compagnie, ne se bornoit pas à prononcer des arrêts frivoles sur le ton et les manières ; elle exerçoit une police sévère très-utile aux mœurs, et qui formoit une espèce de supplément aux lois ; elle réprimoit, par sa censure, les vices que ne punissoient pas