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réputation d’homme d’état, sa conduite à la guerre lui en avoit assuré une militaire très-brillante ; et il avoit la modestie d’être constamment insipide et d’une complète nullité dans un salon.

À cette époque[1], de grands souvenirs et des traditions récentes maintenoient encore en France de bons principes, des idées saines et des vertus nationales, affoiblies déjà néanmoins par des écrits pernicieux et par un règne plein de foiblesses ; mais on trouvoit encore, à la ville et à la cour, ce ton de si bon goût, cette politesse dont chaque François avoit le droit de s’enorgueillir, puisqu’elle étoit citée, dans toute l’Europe, comme le modèle le plus parfait de la grâce, de l’élégance et de la noblesse. On rencontroit alors dans la société plusieurs femmes et quelques grands seigneurs qui avoient vu Louis XIV ; on les respectoit comme les débris d’un beau siècle ; la jeunesse, contenue par leur seule présence, devenoit naturellement, auprès d’eux, réservée, modeste, attentive ; on les écoutoit avec intérêt ; on croyoit entendre parler l’histoire. On les consultoit sur l’étiquette, sur les

  1. Vers 1770.