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mens qu’on veut rapporter, et alors il faut s’accuser sincèrement, et ne point chercher à atténuer ses torts, c’est ce que je vais faire. Je pourrois dire que je ne fus déterminée que par l’intérêt de mes enfans, que cette résolution me coûta, et qu’elle fut un sacrifice maternel : si cela étoit, le ciel eût béni cette action, mais Dieu, qui lit au fond des cœurs, en connut les motifs, et l’a sévèrement punie, elle le méritoit. Il est certain que je comptai pour beaucoup les avantages brillans que j’en pouvois retirer pour l’établissement de mes enfans, mais, quand je n’aurois point eu d’enfans, j’aurois désiré cette place ; j’y avois renoncé de bonne foi pour augmenter l’estime et l’amitié de madame de Custines. Après sa mort je perdis cette émulation généreuse qui élève l’âme, et qui la rend capable des plus nobles sacrifices ; il me sembloit qu’il n’y avoit plus personne au monde qui eût assez de délicatesse, d’austérité et de connoissance de mes sentimens, pour blâmer en moi des actions qui n’auroient rien de criminel ; l’admiration que j’avois eue pendant six ans pour madame de Custines, l’espèce d’enthousiasme que m’avoit inspiré ses éminentes vertus, m’avoient fait presque