Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/285

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’énormes araignées, de gros vers de terre, des grenouilles, des crapauds, etc. ; à l’aspect de tous ces monstres, nous prîmes la fuite, extrêmement refroidies sur l’étude de l’histoire naturelle. Pendant plus de quinze jours, quoiqu’on eût mis beaucoup de soin à enlever de ma chambre tous ces insectes, j’en retrouvois toujours quelques-uns ; cependant nous continuâmes la lecture du Spectacle de la nature. M. Blanchard nous lut ensuite le théâtre de Fagan, auteur ingénieux et spirituel, dont les comédies nous firent grand plaisir ; outre ces lectures, dans ma chambre à ma toilette, tandis qu’on peignoit mes longs cheveux, ce qui étoit fort long, et qu’on me coiffoit, je lus l’Histoire ancienne de Rollin, et les jolies comédies de Dufrény, et ensuite celles de Marivaux pour la deuxième fois. J’avoue que j’aimois cet auteur à la folie ; il a parfaitement connu un coin du cœur des femmes, et il l’a dévoilé avec une finesse et une grâce qu’on ne trouve dans aucun autre auteur masculin. Il est parfait lorsqu’il peint les caprices, les inconséquences, les boutades d’une femme agitée d’un violent dépit causé par un peu d’amour et beaucoup d’amour-propre ; il ne savoit