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espèce, ni en voiture d’aucun genre, ni à pied, ni à cheval, ou sur un âne ou un mulet, ni même par terre, ni en nageant. Personne ne pouvoit deviner cette énigme. Voici comment il l’expliquoit : il se mettoit en chemin, se plongeoit dans la rivière, et, ne sachant pas nager, il s’accrochoit avec ses deux mains à un bateau ; et ainsi remorqué, il arrivoit à Passy traîné par ce bateau. Après le souper, il y avoit toujours une petite lecture, et en outre on me faisoit déclamer des vers. J’en savois par cœur un nombre prodigieux. Telle étoit ma vie, qui me convenoit d’autant plus que j’avois une amie dans la maison ; c’étoit une jeune personne, jolie, douce, intéressante, que M. de la Popelinière avoit en quelque sorte adoptée pour sa fille. Il l’avoit mariée à M. de Zimmerman, officier dans les Gardes Suisses, qui étoit jeune, aimable, et qui jouoit du violon de la seconde force ; l’histoire de madame de Zimmerman étoit singulière. La voici : Elle étoit fille d’un pauvre gentilhomme, et avoit été élevée au fond d’une province, à cent cinquante lieues de Paris : pour une affaire de famille qui dépendoit des fermiers-généraux, elle écrivit à M. de la Popelinière, qu’elle ne